• A coups d'exemples édifiants, le journaliste épingle tous ces Français qui se servent de l'Afrique plus qu'ils ne la servent

     

    La soupe est bonne en Afrique, mais certains refusent d'y tremper leur cuillère. Ces ingrats préfèrent sauter à pieds joints dedans, au risque d'éclabousser la cohorte d'avocats, de journalistes, d'hommes politiques et de conseillers en communication qui, eux, n'ont pas leur pudeur.

     

    Journaliste à l'Express, Vincent Hugeux a enquêté sur ces "sorciers blancs", "les faux amis français de l'Afrique". De quoi se faire un paquet d'ennemis. "Que vient-on y chercher "  demande l'auteur, qui arpente le continent depuis des années. "Les honneurs que l'on se voit refuser ailleurs, l'argent facile, l'illusion du pouvoir."  Surtout l'argent... "Là où vous gagnez 100 ailleurs, vous touchez 300 à 400 sur le continent. Les Africains sont très généreux", affirme Bernard Rideau, spécialiste en marketing politique.

     

    Le livre abonde en exemples édifiants. Au Congo-Brazzaville, véritable paradis des sorciers blancs, c'est le champion du microcrédit, Jacques Attali, qui décroche un contrat à 10 millions de francs (en 1998) en tant que "conseiller général" du président Denis Sassou-Nguesso, réputé pour sa générosité. Malgré tout, le publicitaire Thierry Saussez se paie le luxe de se voir reprocher par le même Denis Sassou-Nguesso ses tarifs trop gourmands. Il n'y a plus ni gauche ni droite en Afrique, juste un gâteau à se partager. A Abidjan, dans l'antichambre du président Laurent Gbagbo, on croise tout aussi bien Roland Dumas que Jacques Vergès...

    Faisant fi de tout réflexe corporatiste, Hugeux n'hésite pas à épingler à son tableau de chasse les "plumitifs". L'auteur réserve une place de choix à l'hebdo Jeune Afrique et à son patron, Béchir ben Yahmed, témoignages d'anciens collaborateurs ou de politiques africains à l'appui. L'un d'entre eux évoque ainsi "deux versions d'une analyse sur le Burundi. L'une élogieuse, l'autre sévère», ajoutant que «c'est l'accueil réservé par les autorités de Bujumbura à une offre commerciale qui a dicté le choix final". 

     

    Quel mystérieux ressort pousse les dirigeants locaux à débourser des sommes imposantes pour les beaux yeux de conseillers français, souvent incompétents ? Un début d'explication : "Le chef préfère livrer ses secrets de famille à l'étranger plutôt qu'au frère ou au cousin"

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    Plus de quarante ans après les indépendances, la fascination du "Blanc" opère toujours, même si elle va s'estomper avec l'arrivée aux commandes d'une nouvelle génération de dirigeants.

     

    Certains reprocheront à l'auteur de livrer une vision partielle des rapports entre la France et l'Afrique, en ne donnant pas à voir ces hommes et ces femmes qui, sincèrement attachés au continent, y travaillent et aident à son développement. Mais Vincent Hugeux a fait un choix, et il s'y tient. Son entreprise a même quelque chose de salutaire. Car, du Cameroun au Sénégal en passant par le Togo et le "Congo-Brazza" la colère gronde contre ces Français qui se servent de l'Afrique plus qu'ils ne la servent.

    Le jour venu, elle pourrait bien emporter ce qui reste sur le continent de ces liens si particuliers entre Français et Africains.


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